10 juillet 2025

Me Sophie Papillon : Défendre ceux qui n’ont pas de voix

Par Pierre-Luc Beauchesne, avocat

Membre du Barreau du Québec depuis 2005, Me Sophie Papillon a consacré la majeure partie de sa carrière au droit de la jeunesse, et ce, dans différents milieux. L’écriture occupe aussi une place centrale dans sa pratique. En plus de lui procurer une certaine dose de plaisir et de satisfaction, elle lui permet de mettre en lumière des lacunes et faiblesses du système, mais surtout de proposer des solutions.

Après son baccalauréat en droit à l’Université de Montréal, Me Papillon fait son stage et commence sa carrière chez Matteau Poirier avocats où elle représente des travailleurs en matière de santé et sécurité au travail devant la Commission des lésions professionnelles, aujourd’hui le TAT. Deux ans plus tard, elle décide, avec son conjoint, de partir à l’étranger pour vivre de nouvelles expériences. Elle complète une maîtrise en droit international de la personne au Royaume-Uni à l’Université de l’Essex, avant d’effectuer un stage au Cambodge au sein de l’Assistance des Nations Unies au tribunal des Khmers rouges.

À son retour au Québec, encore marquée par ses expériences à l’étranger, elle pense poursuivre des études de doctorat en droit international pénal, mais pose plutôt sa candidature à un poste à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. C’est le début de son histoire d’amour avec le droit de la jeunesse. De 2012 à 2022, elle conseille les enquêteurs dans leurs mandats en matière de protection de la jeunesse et représente aussi la Commission notamment dans le cadre de demandes en lésion de droit.

En 2022, elle se lance à son compte. Pendant un peu plus de deux ans, elle représente des enfants en Chambre de la jeunesse dans le cadre de mandats d’aide juridique. « Je me suis offert un cadeau. Je voulais consacrer tout le temps nécessaire à chaque dossier que je prenais. J’allais souvent rencontrer l’enfant dans son milieu de vie, soit chez ses parents, en famille d’accueil, dans un centre de réadaptation ou dans un foyer de groupe, pour mieux comprendre sa réalité. Ça m’aidait aussi beaucoup à créer un lien avec lui. »

Vu son expérience à la CDPDJ, en matière de lésion de droits, on lui référait souvent ce type de dossiers. Ce n’était pas facile. Elle en a vu de toutes les couleurs. Elle a représenté notamment une jeune fille qui a été agressée sexuellement par son éducateur de foyer de groupe. Lors de l’audition, elle a notamment demandé au Tribunal de recommander à la DPJ nationale de déterminer des normes de pratique en matière d’évaluation pour signalements d’abus sexuels commis par un tiers, ce qui a été accordé par le juge.

Depuis juin 2024, Me Papillon travaille pour le Protecteur du citoyen, qui reçoit les plaintes à l’égard du réseau de la santé et des services sociaux, où elle conseille entre autres l’équipe en matière jeunesse. Encore une fois, le droit de la jeunesse occupe une place importante dans le quotidien de cette mère de 4 enfants, deux garçons et deux filles âgés de 14, 12, 8 et 6 ans.

Me Papillon a toujours aimé écrire. En 2015, elle rédige un premier article en droit de la jeunesse portant sur les jugements en matière de lésions de droit, qui a été cité à de nombreuses occasions, dont à la Cour suprême du Canada. « C’est extrêmement prenant d’écrire des textes de doctrine. Ça prend du temps, mais ça me stimule énormément. J’aime me lever tôt le matin, souvent pendant que mes enfants dorment encore, pour analyser des arrêts et rédiger. »

Dans ses textes, Me Papillon n’hésite pas à proposer des solutions afin d’améliorer les choses et de permettre une meilleure défense des droits des enfants ou de leurs parents. En 2022, dans un article sur les recours pécuniaires à l’encontre de la DPJ, elle suggère une interprétation plus restrictive de l’immunité pour la DPJ et une modification législative afin que celle-ci soit limitée aux actes et décisions qui se situent dans sa sphère décisionnelle. Dans un autre article, elle s’est penchée sur les règles actuelles en matière d’accès et de communication de la preuve en chambre de la jeunesse qui pourraient être modifiées, selon elle, à la lumière des principes de justice fondamentale.

Lorsqu’on lui demande ce qu’on pourrait faire de plus pour améliorer notre système de protection de la jeunesse, elle répond que la réflexion pourrait se poursuivre afin d’adapter le processus judiciaire aux enfants. Les salles de cour sont des milieux froids, souvent intimidants pour les enfants qui ont une certaine difficulté à s’exprimer et à se faire entendre. On les entend encore très peu, selon elle.

Par sa plume, Me Papillon a réussi à trouver sa voie pour tenter à sa façon de changer les choses, et ce, dans un souci de faire avancer ce qui lui tient à cœur : les droits des enfants.

En faisant revivre la chronique Figure de Maître, créée sous le bâtonnat de Me Lynne Kassie en 2000, le Barreau de Montréal souhaite mettre en lumière des avocats inspirants, auteurs de réalisations exceptionnelles et qui, à travers leurs actions, contribuent à faire rayonner la justice au sein de la profession.

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